Dans son nouveau rapport « La presse et la planète en danger », publié le 3 mai à l’occasion de la Journée mondiale pour la liberté de la presse, l’UNESCO révèle que 70 % des journalistes environnementaux ont subi des attaques liées à leur travail.
Lors d’une consultation menée par l’UNESCO en mars 2024 auprès de plus de 900 journalistes environnementaux issus de 129 pays, plus des deux tiers d’entre eux ont en effet déclaré avoir subi des attaques, des menaces ou des pressions liées à leurs activités. Parmi eux, deux sur cinq ont par la suite subi des violences physiques.
« Les travailleurs des médias documentent (…) la dégradation environnementale et apportent la preuve du vandalisme environnemental, aidant à demander des comptes aux responsables, a affirmé le Secrétaire général des Nations Unies dans son message du 3 mai 2024, lors de la Journée mondiale de la liberté de la presse. Il n’est pas surprenant que certains gens puissants, des sociétés et des institutions, ne s’arrêtent devant rien pour empêcher les journalistes environnementaux de faire leur travail ».
Des attaques contre les journalistes en forte hausse
Cette Journée mondiale a pour thème cette année la liberté de la presse dans le contexte de la crise environnementale actuelle. La désinformation sur ces questions peut aboutir à un manque de soutien public et politique à l’action climatique, comme à des politiques efficaces et à la protection des communautés vulnérables les plus affectées.
Le rapport de l’UNESCO sur « La presse et la planète en danger » rappelle aussi qu’entre 2009 et 2023, au moins 749 journalistes et médias couvrant les questions environnementales ont été victimes de meurtres, de violences physiques, de détentions et arrestations, de harcèlement en ligne ou de poursuites judiciaires.
L’Observatoire de l’UNESCO des journalistes assassinés fait état d’au moins 44 meurtres de journalistes environnementaux au cours des 15 dernières années, parmi lesquels seulement cinq ont donné lieu à des condamnations, soit un taux d’impunité alarmant de près de 90 %.
Plus de 300 attaques ont eu lieu entre 2019 et 2023, soit une augmentation de 42 % par rapport aux cinq années précédentes (2014-2018). il s’agit d’un problème mondial, avec des attaques perpétrées dans 89 pays de toutes les régions du monde.
Un enjeu présent en Europe
Dans son rapport sur la « Répression par l’État des manifestations et de la désobéissance civile environnementales en Europe », publié en février 2024, Michel Forst, le Rapporteur Spécial des Nations Unies sur les Défenseurs de l’Environnement au titre de la Convention d’Aarhus, a fait plusieurs observations relatives aux médias dans les pays européens.
« En plus de se voir refuser l’accès aux manifestations et aux actions de désobéissance civile environnementales ou d’être empêchés de les filmer, soit en étant physiquement éloignés du site (par exemple, au Portugal) ou en se voyant refuser l’accès à une rue étroite où la police avait rassemblé des militants et bloqué l’accès avec des camions de police (par exemple, en Espagne), des journalistes ont également été pris pour cible par la police, notamment :
- En France et en Espagne, où des journalistes couvrant des manifestations environnementales ont été arrêtés, détenus et poursuivis comme s’ils participaient à la manifestation.
- En Pologne, en Suède, et au Royaume-Uni, où des journalistes qui couvraient les manifestations environnementales ont également été arrêtés. En Suède, un journaliste a été arrêté lors d’une manifestation pour le climat, soumis à une fouille à nu complète au poste de police, placé en garde à vue pendant six heures et s’est vu confisquer son matériel ».
Des journalistes qui risquent leur vie
« Mais les journalistes environnementaux ne sont pas les seuls exposés, a poursuivi António Guterres dans son message du 3 mai 2024. Autour du monde, les travailleurs des médias risquent leur vie pour nous apporter des informations sur tout, de la guerre à la démocratie. Je suis choqué et consterné par le nombre élevé de journalistes tués dans les opérations militaires israéliennes à Gaza ».
La Journée mondiale de la liberté de la presse a été instaurée par l’Assemblée générale des Nations Unies en 1993, à la suite d’une recommandation de la conférence générale de l’UNESCO. Du 2 au 4 mai, le Chili et l’UNESCO organisent la Conférence de la 31e Journée mondiale de la liberté de la presse.
Vers une feuille de route mondiale contre la désinformation sur le climat
L’un des principaux résultats de cette conférence sera une feuille de route mondiale de l’UNESCO contre la désinformation sur le climat, qui identifie les rôles que les gouvernements, les médias, les universités et les chercheurs, la société civile et les plateformes numériques peuvent jouer pour soutenir et protéger les journalistes environnementaux et promouvoir l’intégrité de l’information diffusée en ligne sur l’environnement et le dérèglement climatique.
Par ailleurs, le World Press Freedom Index, publié le 3 mai par Reporters sans frontières (RSF), évalue la situation dans 180 pays. La situation est la meilleure dans cinq pays d’Europe du Nord (Norvège, Danemark, Suède, Pays-Bas et Finlande), tandis que la Belgique se classe 16e et la France 21e. Les cinq pays où la situation est la moins bonne sont la Syrie, l’Afghanistan, la Corée du Nord, l’Iran et le Turkménistan. La Chine figure également parmi les derniers, en termes de respect de la liberté de la presse, au 172e rang.
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